Du bon usage des étoiles de Dominique Fortier

  J’ai lu le premier roman de Dominique Fortier, «Du bon usage des étoiles» paru en 2008. Il s’agit d’un roman inspiré de la dernière expédition dans le Grand Nord canadien de John Franklin impliquant les navires Terror et Erebus (les épaves ont été retrouvées en 2014 et 2916). En mai 1845, les deux navires sous son commandement partent à la recherche du passage du Nord-Ouest avec cent trente-trois hommes à bord. En principe, ils disposent de provisions pour trois ans et de bateaux solides disposant de chauffage. Malgré cela, l’hiver venu, les deux navires se retrouvent coincés dans les glaces de façon inattendue et beaucoup plus longtemps que prévu...

C’est là que le roman prend toute son ampleur, il raconte le temps qui passe pendant cette immobilité oppressante et cruelle dont Francis Crozier, le commandant du Terror, nous fait part dans son journal. Il nous parle du beau et surtout du laid. Dans le même souffle, son esprit ne peut cesser de pensée à Sophia Cracroft son amour inavoué. C’est ce qui permet à Fortier de mettre en scène ces femmes, Sophia et sa tante Jane Franklin, la femme de John, qui vivent à Londres.

Ainsi, nous avons le pouls de ce qui se passe à Londres où l’inquiétude monte en dépit des thés d’après-midi, des réceptions et des bals de fin de soirée. Malgré les mondanités, Jane, elle-même une grande voyageuse, femme de tête intelligente, aimerait bien recevoir de nouvelles de l’expédition. Tous les soirs, elle écrit de longues lettres à son mari en espérant que mystérieusement les mots se rendent jusqu’à lui. Il y a maintenant longtemps qu’un autre navire les a aperçus...

Cette trame narrative secondaire qui se déroule en parallèle nous permet de souffler et d’absorber le drame qui se déroule sous nos yeux. Les hommes meurent l’un après l’autre, John Franklin succombe également à la maladie, ce qui a pour conséquence de placer Crozier, notre personnage principal en charge de l’expédition. Lui qui est plutôt timide, curieux, amant de la nature qui l’entoure se voit contraint de passer en mode survie… Jane réussira à obtenir une expédition de recherche mise en place au printemps 1848. Les navires et leur équipage ne seront pas retrouvés, sauf quelques artéfacts témoins de leur passage.

Ce roman touche au journal, au récit d’aventures, et flirte avec l’histoire et la science (magnétisme, astronomie, météorologie, etc.). Une belle fiction historique basée sur un fait vécu qui met en évidence deux mondes, deux ambiances, complètement opposés; la tragédie et la frivolité. Fortier a trouvé le moyen de mettre en place des personnages féminins forts, malgré la place qui leur était réservée au 19e siècle. On prend plaisir à lire sa plume, elle réussit à nous faire sourire malgré le drame qui se joue. Un autre roman à ajouter dans la pile «à lire»…

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