Erik Larson, un auteur américain, a publié «Dans le jardin de la bête» (2011 / 2012) qui se trouve à être un document historique romancé. Le roman s'ouvre sur les résultats affreux de la torture d'un citoyen américain à Berlin, ce qui en principe ne devait pas arriver. On poursuit avec la nomination d'un ambassadeur hors norme pour le poste vacant en Allemagne.
Le professeur William Edward Dodd (1869 - 1940) était un historien de carrière qui fut nommé ambassadeur en Allemagne nazi par le président Roosevelt. Il lui offrit le poste le 8 juin 1933 et deux jours plus tard il était confirmé par le Sénat. William E. Dodd s'est rendu à Berlin avec sa femme, son fils Bill et sa fille Martha. Il demeura en poste à Berlin de juin 1933 à décembre 1937.
Larson nous fait le récit du mandat de Dodd à Berlin. Il a notamment utilisé le journal de Dodd publié en 1941 et les archives de Roosevelt et du département d'État américain pour «romancer» le travail d'ambassadeur de Dodd et sa vie à Berlin. Toutefois, c'est le récit détaillé des relations de sa fille Martha qui accroche davantage le lecteur. Cette dernière entretient des relations étroites avec des dirigeants nazis et aussi avec un agent secret soviétique. On s'entend qu'il s'agit plus d'un récit que d'un roman, le résultat est donc très proche de la réalité ce qui rend la lecture parfois ardue parce que le quotidien d'un diplomate ce n'est pas ce qui a de plus rocambolesque, quoique... Des réunions, des rencontres, des notes, des missives, des visites, des soirées mondaines, etc... les siennes et celles de sa fille.L'ambassadeur Dodd constate rapidement la cruauté du gouvernement allemand à l'égard des juifs, mais on lui rappelle que le département d'État a fixé comme priorité de son mandat la nécessité de s'assurer que le gouvernement allemand ne manquerait pas de rembourser ses dettes envers les prêteurs américains. Les banques américaines détenaient plus de 100 millions de dollars en obligations allemandes et 60 000 autres citoyens américains détenaient aussi de ces obligations. Bien que Roosevelt lui ait demandé de préserver les valeurs américaines et la démocratie... Dodd tente de faire comprendre au département d'État et à Roosevelt qu'il faut agir en coopération avec les gouvernements européens devant la cruauté et la préparation militaire de l'Allemagne. Mais l'antisémitisme américain non avoué et l'obnubilation des dirigeants face à la dette le font passer pour un incompétent d'autant plus qu'il ne fait pas partie du «Boy's club» des diplomates.
Finalement, 460 pages plus loin, Hitler dévoile son vrai visage... Göring, Goebbels et Himmler ont plus ou moins convaincu Hitler que la police politique SA voulait prendre le pouvoir. En fait, Hitler craignait plutôt que Franz von Papen aille voir le vieux président Paul von Hindenburg qui contrôlait encore l'armée régulière et que celle-ci intervienne possiblement contre les SS ce qui allait contrecarrer ses plans. Hitler décida d'agir et de faire «une pierre deux coups» (il y eut beaucoup de pierres et de coups) et procéda à une purge de tous les dirigeants, soldats et figures politiques qui n'étaient pas dans son clan ou qui ne semblaient pas être dans son clan. Le samedi 30 juin 1934 et les jours suivants des milliers «d'ennemis de l'État» furent fusillés. À partir de ce moment, Dodd signala à son gouvernement qu'il n'y avait plus rien à faire avec ce gouvernement et il limita ses contacts avec le gouvernement au strict minimum. Puis arriva ce qu'il devait arriver, le vieux président décéda deux ans plus tard et Hitler se déclara Führer et seul dirigeant du pays.
Il n'est pas inintéressant de comprendre que les gouvernements occidentaux savaient ce qui se passait en Allemagne, mais que la dette, l'antisémitisme larvé de tous et la volonté américaine de ne pas intervenir en Europe faisaient en sorte qu'on a laissé aller Hitler jusqu'à l'inconcevable... Pour aimer ce livre, je crois qu'il faut avoir un attrait pour ce qui entoure la Deuxième Guerre mondiale et son époque. Pour ma part, j'ai trouvé ça un peu long, mais je suis content d'avoir rencontré l'ambassadeur Dodd et sa fille Martha qui resta longtemps en contact avec le KGB russe....
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